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Coopération des équipes : oubliez le baby-foot !

Dernière mise à jour : 27 mars


Photo d'un babyfoot avec les joueurs de l'équipe alignés comme des petits soldats

Tous les CEO savent que l’engagement de leurs équipes est une des clés de la réussite de leur stratégie. Une grande partie des organisations distribue toujours la parole selon les rangs hiérarchiques. La tentation est forte d’adopter les propositions à la mode qui promettent des organisations heureuses. Pris isolément, ces tactiques sont des raccourcis infantilisants qui empirent le problème. Manifeste contre la “culture du baby-foot”.


Mise en situation


« Misère… Je viens d’apprendre par hasard que Nathalie et Julien, du codir, sont en conflit larvé sur l’exécution du plan 2024. Leurs objectifs sont alignés sur un KPI commun : le taux de rétention des clients à 12 mois. Ça leur demande un réel effort de coopération… mais c’est la seule façon de devenir rentable.
C’est quoi le problème ?
Apparemment Julien trouve que Nathalie va trop vite sur l’exécution. Il se replie sur lui-même et rien n’avance.
Tu expliques ça comment ?
Nathalie sait exactement ce qu’il faut faire, mais elle ne prend pas en compte que Julien est moins intuitif qu’elle, qu’il a besoin de pondérer ses décisions. Une demi-heure d’échange aurait sûrement suffi pour qu’il se sente impliqué…
Tu voudrais quoi idéalement ?
Qu’ils règlent leur problème tous seuls ! Si je dois intervenir à chaque fois que deux personnes ont des différends, on a aucune chance d’y arriver… »

Les masques au bureau


Le matin en arrivant au bureau, vous enfilez votre masque professionnel : pour travailler avec des collègues que vous n’avez pas choisis et qui parfois vous insupportent, pour vous protéger contre votre propre tendance au surinvestissement, pour contrôler votre image... Les raisons sont multiples, et tous vos collaborateurs font la même chose.


Pourquoi ? Demandez à quelqu’un d’extérieur de vous décrire l’entreprise type : vous obtiendrez une pyramide avec un chef et des subordonnés. Des rôles, avec des masques. C’est la représentation commune.


Et pour cause : si vous regardez un navire marchand, une usine sidérurgique ou une centrale nucléaire, vous observerez que la performance des organisations qui les régissent repose avant tout sur la robustesse des process. Ce sont les process qui dictent en priorité le comportement des personnes, avec pour finalités la fiabilité et la sécurité, bref une performance normalisée. L’autonomie de chacun, l’épanouissement de l’individu par la réalisation de sa mission individuelle sont relégués au second plan.


C’est l’héritage de la révolution industrielle. A l'époque et pendant le 20e siècle, la concurrence était plus faible, la main d’œuvre moins qualifiée et l’encadrement plus rare. Cela explique la prévalence de ce type d'organisation, raison pour laquelle cette représentation est si largement partagée.



Une représentation largement éculée pour beaucoup d’entre nous


Les représentations symboliques, les archétypes sont utiles pour se représenter le monde et se positionner sur les sujets qu'on connaît peu ou mal. Malheureusement, ces archétypes ont souvent la vie plus dure que les objets qu'ils décrivent. C'est ce qui fait qu'aujourd'hui, à l'heure des organisations agiles et de la transformation digitale généralisée, le masque reste la norme inconsciente.


Aujourd'hui, la situation a changé. Dans l'économie de la connaissance, les entreprises cherchent à tirer parti de la richesse du potentiel de chacun pour susciter une performance collective. C'est cette tension entre l'injonction aux masques et le souhait de performance collective qui nous intéresse.



À quoi ressemblerait la vie en entreprise sans masque ?


Il s'agit d'un curseur, que nous ajustons tous en permanence. D'un côté, nous pouvons masquer nos émotions, nos préférences et chercher à agir comme le ferait un robot dans notre rôle. À l'autre bout du spectre nous pouvons nous comporter au bureau comme dans notre vie privée. La question intéressante à se poser en tant que CEO : quel type de comportements servira mieux la performance de mon organisation ?


Tout le monde ne fait pas de son entreprise le lieu privilégié de son épanouissement personnel ou social, et c'est bien sûr légitime. D'un point de vue individuel, nous avons listé plein de bonnes raisons de marquer la différence entre son comportement au bureau et son comportement dans la vie perso.


Regardons maintenant ceci sous l'angle du collectif. Si vous lisez cet article, il y a de grandes chances que votre entreprise ne se reconnaisse pas dans le modèle du fordisme. Vous êtes à la tête d'une organisation complexe, composée de multiples talents, qui trace sa voie dans l'incertitude. La coopération entre les membres de votre équipe vous apparaît naturellement comme un facteur de succès. Intuitivement, vous souhaitez que les membres de votre équipe développent naturellement des relations harmonieuses. Vous ne voulez pas qu'ils ressemblent à un groupe de robots !


Vous savez que la communication entre les membres de l'équipe est cruciale. Si tout le monde est dans une bulle de silence, les rancœurs et les tensions vont s'accumuler et finiront par créer des dissensions et des inefficacités préjudiciables à l'atteinte des résultats. Pire que ça, vous risquez d'être un leader isolé de la réalité du terrain. Si personne n'ose dire qu'il a perdu son temps en réunion, qui viendra challenger les décisions des managers ? Or vous voulez que vos managers soient challengés, et eux-mêmes le souhaitent également. Si personne ne souligne les contributions constructives ni ne célèbre les réussites, quelle sorte de performance attendez-vous ?


Bien sûr, vous connaissez la force du professionnalisme. L’exigence de savoir-faire qui vous différencie des amateurs est la pierre angulaire de votre activité. Impossible de faire une croix dessus : si enlever les masques c’est recréer le BDE d’une école de commerce, non merci.


Comment faire alors pour créer les conditions d’une coopération active entre les membres de l’équipe ?



La réponse préfabriquée : la « culture babyfoot »


Beaucoup d'organisations se démarquent de « l'entreprise à papa » par des symboles tangibles censés favoriser les relations sociales entre les collaborateurs. Babyfoot dans les bureaux, apéro, et autres team building pré-packagés viennent facilement à l'esprit. C'est vrai que c'est sympa de passer des moments ludiques entre collègues, et côté image ça fait illusion quelques temps. Cependant c’est illusoire d’imaginer que cela suffise à susciter une collaboration de qualité. Spoiler : ça empire la situation.


Tout d'abord, toutes ces activités se situent explicitement en dehors du cadre de la mission professionnelle. D'un côté un environnement ludique sans contrainte où on encourage la légèreté : le baby-foot. De l'autre un contexte professionnel exigeant, où chacun doit délivrer des résultats pour atteindre ses objectifs personnels et contribuer à ceux de la boîte. Ces initiatives parées de bonnes intentions sont infantilisantes pour les collaborateurs : qui peut sérieusement croire qu'une partie de rigolade suffira face aux enjeux de la coopération entre des personnes issues de parcours divers et confrontées à une pression élevée ? Cette dissonance créera nécessairement un malaise, et in fine une baisse du respect envers le leadership... Bref, tout l’inverse de l’effet escompté !



Proposition inconfortable : le feedback


On cherche donc à créer un environnement professionnel dans lequel les collaborateurs soient équipés pour partager la joie du travail en commun en gérant les inévitables tensions. L'outil principal de cette communication qui dépasse le cadre strict quantitatif du travail, c'est le feedback.


Les anglo-saxons sont beaucoup plus à l'aise que nous avec cet outil. C'est probablement ce qui fait qu'on n'a pas trouvé de meilleure traduction en français que le mot anglais. Chez nous, « feedback » est un mot qui fait peur et qui porte une connotation négative. Il évoque la confrontation, les conversations difficiles… Savoir le donner, savoir le recevoir : manier le feedback dans l'environnement de l'entreprise est une compétence difficile à manier et que l’on n’apprend pas à l'école.


C'est la proposition inconfortable que nous vous invitons à considérer : bousculer intentionnellement les codes traditionnels pour créer une culture d'entreprise où les sujets difficiles peuvent être abordés.



Cela démarre par le courage du CEO


“Si une petite souris s’était glissée dans le plafond elle n'aurait pas pu distinguer les rôles hiérarchiques des participants de la réunion” : voici un bon témoignage (vécu) de la culture du feedback en action. Dans la plupart des organisations, le leader joue un rôle d'exemple. Sa posture sera copiée par mimétisme. Pour que les membres d'une organisation sentent que la parole est libre, le signal doit rayonner depuis le leadership : chacun peut s'exprimer en dehors du cadre opérationnel de ses tâches, pourvu que l’intention soit de contribuer à la réussite du projet.


A cet effet, le leader adapte sa posture d'une part, et acquiert certaines méthodes d'autre part. Le sujet des méthodes est largement traité par ailleurs ; concentrons-nous sur la posture.


Leader de niveau 5 popularisé par Jim Collins, dirigeant d’organisation opale ou simplement leader participatif, les modèles actuels invitent les CEO de notre temps à « ranger leur ego ». Le sujet n'est pas de le ranger, mais plutôt d'ajuster la place qu'on lui donne dans nos interactions avec les membres de nos équipes. Tout au long de la journée les occasions de le faire sont nombreuses : accueillir une suggestion, prendre une décision en réunion, ou même tout simplement discuter à la machine à café… La qualité de l'écoute du CEO est le premier marqueur de son ouverture ; c'est elle qui encourage à s'ouvrir envers lui. C'est difficile au début car on assoit naturellement souvent sa posture de leader sur une certaine distance avec les membres de l'équipe. Il ne s'agit pas de diluer la responsabilité du leader mais bien de chercher à l'exercer dans une modalité de communication au service de la performance collective. Être reconnu pour l'authenticité de son écoute n’enlève rien aux prérogatives ni aux responsabilités d'un dirigeant : changer d’avis, c’est prendre une meilleure décision en renforçant son crédit auprès de son équipe.


Le second aspect de cette posture est également difficile à déployer pour un dirigeant habitué à laisser voir une façade calme et sereine quelle que soit la situation : il s'agit de partager une partie de ses émotions. Une aventure professionnelle est un défi face à l'adversité qui suscite en chacun des émotions différentes. Si le leader a le courage de partager une partie des siennes, c'est un signal pour tous les membres de l'organisation qu'ils peuvent en faire de même.



Un jeu qui en vaut la chandelle : la bienveillance sans complaisance


Cette posture est un aspect fondamental de ce que chez Sidekicks nous appelons la bienveillance sans complaisance. Il s'agit de mettre tous les sujets sur la table y compris les sujets qui touchent aux relations entre les personnes, et de travailler cette matière en respectant les aspirations de chacun et l'exigence de performance de l'entreprise.


  • Quelqu’un de mon équipe ne livre pas ce que j’attends ? Je sais comment lui délivrer ce message sans créer de conflit. Je ne tergiverse pas pendant des mois avant d’ouvrir ce sujet épineux.

  • Nathalie et Julien n’arrivent pas à travailler ensemble ? Ils peuvent évoquer cette tension, puis la décortiquer pour la désamorcer sans que j’intervienne.

  • Je perds mon temps en réunion ? Je sais l’expliquer à mon manager, et lui sait l’entendre sans se vexer. Nous arrivons à une solution pragmatique.


Le CEO s’efforcera de témoigner encore et toujours de son intention de bâtir un collectif soudé, et s’assurera que chacun s’entraîne à cette forme exigeante de communication. Les bénéfices en sont considérables. Quelques exemples :


Conflits territoriaux :

Nathalie et Julien du codir seront armés pour désamorcer leur conflit naissant par eux-mêmes. Ils épargneront à leur CEO un rôle d’arbitre – et des soucis inutiles…


Entretiens de fin d’année :

C'est très exigeant de préparer une évaluation de performance. Il faut à la fois transmettre l’appréciation requise par les résultats de la personne et décrire clairement ses zones de progression, voire identifier des lacunes préjudiciables à ses résultats. Un manager qui pratique régulièrement le feedback avec les membres de son équipe saura délivrer des messages clairs et justes – beaucoup mieux valorisés par ses collaborateurs que trois idées toutes faites produites par Chat GPT !


Rétention des talents et résilience de l’organisation :

Les collaborateurs qui se sentent écoutés démontrent un engagement beaucoup plus fort pour la mission de l'entreprise. Celle-ci remplit sa fonction de communauté humaine – un facteur largement différenciant aujourd’hui.


Le feedback formera la base d'une culture d'entreprise robuste, saine, génératrice de productivité et de profit. Rien n'empêche alors de réintroduire le baby-foot – il trouvera sa juste place !

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